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 Périples et péripéties de deux compagnons

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Lash

Lash


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PostSubject: Périples et péripéties de deux compagnons   Périples et péripéties de deux compagnons EmptyTue 5 Aug à 23:35

Sombrant dans l'inconscience, Karodir se remémora les temps passés au sein d'Hogran. Fière cité à la terre fertile, digne des ancêtres, capitale de la région, bien avant l'édification de Nog Dor. Elle était sans l'ombre d'un doute un chef-d'œuvre de la civilisation naine. Ses bâtiments étaient grandioses, constitués des plus belles pierres, ils étaient sources de joies et de dignité pour les populations. L'hôtel de ville, majestueux et imposant, avec sa hauteur démesurée d'une dizaine de mètres s'opposait en tout point aux créatures qui y travaillaient. Son hall était fait de marbre, les bureaux eux aussi surélevés étaient fabriqués en chêne massif.
Tout dans cette cité démontrait la richesse de ses habitants. Pourtant tous les souvenirs que le nain avait possédé disparaissaient lentement. Seules demeuraient les visions d'horreurs de la ville rongée par les flammes. Cependant, le temps s'écoula et ses peurs furent remplacées dès son réveil. Pour le moins curieux, tombé inconscient sur la Grand Place, il ne s'attendait pas vraiment à se retrouver dans un lit particulièrement douillet. Toutefois, Le choc fut pour lui lorsqu'il essaya de se relever... Rien, absolument rien, tout son corps était immobile, seuls ses yeux, hagards, témoignaient de la détresse grandissante de l'adolescent.
Il ne comprenait plus, avait-il était drogué ou son corps était-il seulement entrain de lui faire savoir qu'il n'était pas en état de fonctionner. Il avait entendu de telles fables dans sa jeunesse, un vieux compteur de passage au fort lui avait alors expliqué que la race naine était la plus forte de toute mais qu'en cas de blessure physique ou mentale profonde, le corps tombait en état de léthargie et qu'indépendamment de la volonté du nain, il déciderait de lui-même quand il se réanimerait. Il va sans dire que tous les nains présents avaient ri à cette histoire. Le compteur lui-même ne semblait pas y attacher une grande importance mais selon lui, si le corps se mouvait avant la fin de la journée alors le souffrant était considéré comme un guerrier hors pair que nul ne pourrait jamais défaire en duel.
Qu'importe que cette histoire fût vrai ou non. Pour Karodir, il n'en restait pas moins qu'il était coincé dans un lit, dans une maison inconnue avec la désagréable impression d'être observé. Nerveux à l'idée que son corps puisse contenir un poison, il resta éveillé jusqu'à la nuit tombé. Plus les heures passaient, plus son corps semblait retrouver sa capacité à se mouvoir. Personne n'était venu le voir pourtant cette sensation d'être regardé ne cessait de s'accroître. La troisième heure de la soirée approchait lorsqu'il retrouva l'usage de ses jambes, il se mit à regarder tout autour de lui et finit par comprendre le pourquoi de son mal-être. Caché sous le lit, seuls les yeux d'une petite créature reflétaient la lumière. Voilà de nombreuses années qu'il n'avait pas vu de tels yeux. La dernière fois remontait à son premier séjour dans la cité d'Ympfelis, il n'avait alors que huit ans et il avait vu un homme d'un certain âge posséder un tel regard. Enfin un homme voilà qui était assez difficile à croire, légèrement plus grand qu'un nain il était aussi trapu qu'une branche de noisetier. Son compagnon lui avait alors parlé des demi-nains, les Nigraks, accepté comme individus à part entière dans cette ville, ils étaient chassés des territoires nains autant que chez les hommes. Êtres désignés contre nature, ils représentaient les fruits d'amours interdits par les mœurs et les lois naines.
Élever dans la grande cité, Karodir n'avait jamais compris la haine de certains de ses pairs à l'égard des Nigraks. Les reconnaitre était chose aisée, tous possédaient des yeux d'un bleu azur profond, chose impossible pour un "véritable" nain. Caché sous le lit, le petit-être ne semblait pas avoir plus d'une huitaine d'année et la peur se reflétait dans son regard. Était-ce lui, Karodir Thanort qui effrayait cet enfant ? Voilà qui n'était pas correct envers une personne qui lui avait sans doute sauvé la vie en le recueillant chez lui. La moindre des politesses serait de lui présenter ses remerciements et si possible de lui poser quelques questions.
- Bon, bon, bon... Par où devrais-je commencer ? Que diriez-vous, petit nain, de sortir de votre cachette, que je puisse converser avec vous ?
Malgré ses paroles qui se voulaient aussi douces que possible le pauvre enfant ne fit que reculer davantage sous le lit. Voilà qui était terriblement frustrant, Karodir avait enfin trouvé âme qui vive et pourtant il ne semblait pas pouvoir engager la conversation. Au centre de la pièce se trouvait une table et deux chaises. Il décida d'un prendre une et de la poser devant de lit de sorte à pouvoir regarder le petit démon caché dans la poussière. Il s'assit et attendit, ne clignant pas une seul fois, il le regarda pendant plusieurs heures cherchant à lui faire comprendre qu'il n'avait nullement l'intention de lui faire du mal.
Il lui était bien venu à l'idée de s'en aller mais sans savoir où il était alors même que la nuit était déjà tombé, maintenant que la seigneurie était en crise, il était préférable d'obtenir quelques informations avant de partir à l'aventure.
Finalement, l'attente fut payante, lentement, le petit corps sorti de sa cachette et quelle ne fut pas la surprise de Karodir lorsqu'il regarda la jeune enfant. Il ne s'agissait pas d'un Nigrak mais plus vraisemblablement d'une de leur descendante. Pour un Nain, cette créature n'était pas particulièrement belle mais selon l'admiratif humain il ne faisait aucun doute que sa chevelure blonde et ses yeux bleus ainsi qu'une taille élancé serait particulièrement appréciés. Ces traits étaient assez durs malgré son jeune âge. Aucun humain, avec leur acuité visuelle médiocre ne lui verrait une quelconque familiarité avec les nains. Au moins cette petite pourrait-elle connaître une vie plus ou moins normale si elle arrivait à quitter les terres naines.
Le visage de l'enfant reflétait sa peur, son ressenti témoignait des mauvais traitements qui lui avaient été infligé. Les plaines était les terres les plus conservatrices du royaume et tous les individus qui ne se fondaient pas dans l'idéal général était rejeté avec plus ou moins d'ardeur mais dans tous les cas, nul n'en sortait indemne. Son regard était triste et bien qu'aucune parole ne franchit ses lèvres, sa posture témoignait de sa totale soumission et de sa terreur.


Last edited by Lash on Fri 26 Dec à 14:23; edited 1 time in total
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Lash

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PostSubject: Re: Périples et péripéties de deux compagnons   Périples et péripéties de deux compagnons EmptyMon 15 Sep à 20:40

Ses tremblements semblaient irrépressibles mais malgré cela sa voix se fit entendre.

- Bien...Bienvenu Seigneur !

Encore un talent caché de cette enfant, bien que chevrotante, le son était aussi doux que le son du cristal. Jamais un nain n'avait possédé une telle voix et cela fini de convaincre le nain de la filiation de cet enfant. Néanmoins, une question le taraudait, comment diable, cette enfant pouvait savoir qu'il était le nouveau seigneur de ses terres. Exclus des Plaines depuis des années, il était impossible pour qui que ce fut de le reconnaître. S'il est vrai que la physionomie des nains évolue assez peu en comparaison avec d'autre race, les jeunes années sont celles de tous les changements et plus particulièrement la poussée de la barbe.

- Bien le bonjour Belle Enfant ! Il semblerait que mes yeux ne m'ait pas trompé, vous êtes une jeune hybride n'est-ce pas ? Si la question était abrupte, il lui fallait en connaître ma réponse.
- Je suis désolé, je vous jure que j'essaie de me comporter au mieux, comme le ferait une vrai naine, mais...

Sa voix se tût alors, Il n'existait plus aucun doute dans l'esprit du jeune seigneur, cette demoiselle n'était plus en possession de son libre-arbitre. Livrée aux attaques incessantes de ses "proches", elle avait fini par perdre tout ce qui faisait d'elle sa personnalité essayant désespérément de se confondre dans le modèle nanesque. Voilà qui va être difficile de réveiller sa véritable personnalité après des années de tourmente pensa alors karodir.

- Je n'ai aucune intention de vous faire du mal, je souhaite juste obtenir des réponses à plusieurs de mes questions. Accepteriez-vous que je vous les pose ?
- Eh bien... Oui... Oui j'vois pas de problème à ça.
- La première, la plus importante sans doute, est-ce vous qui m'avez amené en ce lieu ? Et quel est cet endroit ? Je doute que nous soyons encore dans la capitale... demanda Karodir.
- Non Seigneur, vous êtes dans la périphérie sud de la capitale, dans un des repaires qu’utilisaient autrefois les contrebandiers. C'était ici que vivait tous... Tous ceux de mon espèce. Ces dernières paroles avait était soufflait comme s'il s'agissait d'une honte.
- Je vois, mais vous n'avez pas répondu à la première question il me semble, est-ce à vous que je dois de ne pas être mort frigorifié ?
-O...Oui.

Le temps passait et l'enfant finit par se sentir plus à l'aise avec le nain, elle lui raconta alors que les Nigraks avaient été utilisés comme premières lignes lorsque les soldats Tiarand avaient encerclé la ville. Elle ne devait sa survie qu'à la volonté du vieil apothicaire qui l'avait caché dans une de ses réserves, lui faisant jurer de ne pas sortir, qu'importe les bruits qu'elle entendrait. Une dizaine de jours était passé lorsqu'elle avait daigné sortir des sous-sols pour ne retrouver que des ruines et le corps inanimé d'un nain allongé sur le sol.


Last edited by Lash on Fri 26 Dec à 14:26; edited 1 time in total
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Valentian El'Andard
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PostSubject: Re: Périples et péripéties de deux compagnons   Périples et péripéties de deux compagnons EmptyMon 29 Sep à 14:48

La soirée s'annonçait belle ; un vent léger charriait encore les odeurs estivales des champs déjà moissonnés qu'ils avaient dépassés depuis plusieurs kilomètres. Valentian ferma un instant les yeux et laissa ses pensées s'envoler, remonter le fil des années. Il s'en revenait dans les terres de son enfance et pour autant il ne ressentait nullement cette impression douce et familière qui vous effleurait lorsque vous rentriez chez vous. Ce comté n'évoquait plus dans son coeur l'écho exaltant qui vous rappelle à la maison au soir d'un long voyage... Sa demeure, il l'avait quittée en prenant la route depuis le palais royal de Maylaura.
Cinq frères et soeurs l'attendaient pourtant en compagnie de ses parents dans le somptueux château d'Alaryss. Sept personnes qui auraient dû passer avant tout dans l'esprit de Valentian, dans l'ordre de ses priorités, et qu'il n'avait pourtant vues depuis huit ans. Il peinait à se rappeler leurs visages sans que ses pensées dérivassent vers d'autres personnes de sa connaissance. Il lui semblait se souvenir vaguement de la douceur de sa mère, lorsqu'elle l'embrassait tendrement sur le front en fermant un livre de contes avant de souffler les chandelles, des rires de ses jeunes frère et soeur jumeaux qui se répercutaient à travers tous les couloirs, du fracas métallique des épées d'entraînement de ses deux aînés qui lui parvenait depuis la cour et rompait les harmonieuses mélodies en provenance de la chambre ou son autre soeur s'exerçait au chant. Ils avaient dû faire des progrès, tous autant qu'ils étaient, chacun dans son domaine... Valentian n'accordait pas trop de crédit à ces bribes du passé qu'il avait repassées en boucle dans son esprit, aimées, enjolivées, au cours des premiers mois de son long voyage.
Adelendis était devenu un réel frère, comme ceux avec lesquels vous grandissez, vous apprenez, expérimentez la vie. Valentian s'était immédiatement lié au prince héritier davantage qu'il l'avait jamais fait avec ses frères de sang ; leurs centres d'intérêt avaient étaient trop dissemblables et le jeune magicien ne se sentait bien que dans la solitude. Il avait fallu un peu de temps pour que cet état de fait changeât à la cour de Maylaura, mais il y avait rencontré son âme soeur, selon la première définition du terme, bien entendu. Valentian ne versait nullement dans le romantisme, qui le prêtait plutôt à rire au contraire d'Adelendis -et à en juger par le ridicule de certaines situations dans lesquelles il avait surpris le prince, bouquet en main, il estimait avoir entièrement raison en la matière- mais il ne pouvait qu'accorder ce titre à Lysiel. Non comme les poètes le chantaient lors des banquets, car il doutait que ces derniers touchassent à l'essence même de ce lien, mais comme une réalité pure. Lysiel, la nièce du roi, était sa soeur d'âme. Ils se comprenaient d'un regard, parvenait à s'accorder sans discussion, savaient ce que pensait le second à chaque occasion. Cela n'empêchait pas ces opinions de diverger plutôt drastiquement, certes, mais là n'était pas l'important. Auprès de Lysiel il s'était senti vivant. Le monde avait pris des teintes et un intérêt nouveaux, peut-être pas meilleurs mais différents, et ils étaient demeurés.
Valentian soupira, se pencha sur l'encolure de sa monture qu'il caressa distraitement. La fourrure fauve luisait sous le soleil.

- Elle te manque à toi, Erzengel ?

Le griffon inclina les oreilles vers l'arrière au son de la voix du garçon, souffla bruyamment comme en réponse. Valentian ignorait quant-à lui que penser au sujet de son amie. Lui manquait-elle ? Assurément, l'éclat de ses yeux d'azur le hantait tant qu'il en était agacé et, pour peu qu'il abandonnât un instant sa concentration -ce qui lui arrivait bien trop souvent pour un magicien, citation reprise et modifiée de Maître Lauvail- de longs passages de ses discussions avec Lysiel se rejouaient dans sa mémoire. Il y avait huit ans qu'ils avaient pris l'habitude de s'allonger à plat ventre, côte à côté, sur l'épais tapis de la chambre de Val, pour profiter de la chaleur des flammes en réinventant le monde. Au beau milieu de leurs rires les réalités fantasques et folles semblaient attrayantes et se prêtaient aux grandes aventures qu'ils ébauchaient ensemble... Et voilà que quand les grands changements survenaient enfin, c'était pour leur  imposer de les vivre séparément.
Valentian s'était vu proposer la plus haute dignité du royaume, celle de Maître de l'Ordre d'Elnaür, à seulement 15 ans. Jamais personne n'aurait osé rêver d'un tel privilège et le poste fascinait Valentian au plus haut point. Il obtiendrait un pouvoir presque égal à celui du roi, son protecteur, par le biais duquel il pourrait changer bien des choses en ce pays en proie à la guerre qui en avait tant besoin. Toutefois les chevaliers d'Elnaür devaient respecter une règle stricte basée sur un code de l'honneur austère, interdisant entre autres choses le mariage et les aventures amoureuses quelles qu'elles fussent. Valentian se serait accommodé de bien des choses en échange de la distinction de Maître de l'Ordre, notamment d'un déchirement consenti et un rien théâtral qui les aurait séparés, Lysiel et lui, pour le bien du royaume. S'ils avaient pu vivre un bel amour platonique en sacrifiant à l'honneur toute relation plus engagée. Mais elle était nièce de roi. D'un roi qui n'avait qu'un fils pour seul enfant. Lysiel serait mariée en tant que princesse, que ce fût à lui ou non, et la seconde option était bien plus qu'il n'en pouvait supporter. Cette seule probabilité éveillait en lui une haine et une jalousie farouches. Qu'un autre osât la regarder comme sienne, qu'il pût la toucher... Non. Il n'en était pas question. Lysiel et lui-même avaient été réunis par le monde, par l'univers, et personne n'avait le droit d'y redire quoi que ce fût. Mais refuser de devenir Maître de l'Ordre d'Elnaür pour ce mariage était presque aussi impensable. Du jamais vu. On lui avait de plus clairement fait comprendre que le peuple comptait sur lui et ne doutait pas de son allégeance. Il avait d'ailleurs constaté cela en traversant les premières villes, au sortir de la capitale. Tous l'assaillaient de questions et félicitations, lui rendaient honneur comme au nouveau Maître... Il s'était extirpé de leurs griffes de justesse grâce aux ailes d'Erzengel la seconde fois, après quoi il avait résolu de ne plus voyager qu'en passant au minimum à 10 lieues des grandes villes et 4 des villages. Riche idée pour qui aurait du temps à perdre par plaisir ou aurait décidé de composer une ode à la nature en 85 actes et 14 volumes. Valentian avait arrêté sa propre composition mentale au huitième acte, lorsqu'il avait eu épuisé son potentiel de cynisme et d'ironie.
Agacé, le garçon soupira rageusement et bascula la tête en arrière. Les rayons du soleil sur son visage le firent sourire ; il tâcha d'évacuer ses pensées. Il avait quitté la capitale pour quelques mois avant de rendre au roi son choix définitif, mentalement épuisé par le dilemme qu'il suscitait en lui. Il avait espéré rompre avec... à peu près tout. Douce naïveté. Ca n'était pas en vous éloignant géographiquement de la source de vos problèmes qu'ils cessaient de vous harceler, bien malheureusement. Au moins goûtait-il enfin à nouveau à la liberté.
Il ne s'était pas rendu compte qu'elle lui avait à ce point manqué au cours de ses années à Maylaura. Il conservait bien sûr quelque tendance à la solitude -à la "sauvagerie" selon Adelendis, mais les faits avaient montré qu'il avait quasi tout le temps tort lorsqu'un différend l'opposait à Valentian- mais il passait néanmoins le plus clair de son temps entouré de ses professeurs, son tuteur, les conseillers royaux, son frère ou Lysiel. L'empressement et le sentiment diffus d'urgence émanant de ces constantes occupations lui convenaient ; il s'y était accoutumé de telle sorte que son esprit ne supportait plus l'inaction. Voyager seul dans les contrées de son enfance lui avait au moins offert cela : la jouissance de renouer avec le calme et la paix intérieure. En l'instant, il n'avait nul désir de retrouver ses proches de la capitale.
La liberté... Il la ressentait à nouveau, loin de Lysiel et d'Adelendis. L'ultime jouissance de ne vivre que pour soi, d'agir conscient qu'aucun regard ne pesait sur vous, que rien n'importait que vos propres désirs simples et immédiats. La liberté, celle qui se ne trouvait que dans la solitude. La véritable liberté. L'amour et les liens constituaient décidément une prison aux barreaux d’or, qu’il était difficile d’identifier. Elle ne vous en tenait pas moins sûrement entre ses griffes. Valentian ne pouvait qu’admettre qu’il comprenait parfaitement le fond des préceptes de l'Ordre d'Elnaür. L’on n'agissait véritablement avec clairvoyance qu'en étant libre de toute entrave. Or l'amour est la pire des entraves. Il fausse les jugements, bride l’objectivité, retient des décisions justes pour le profit de quelques personnes que vous estimez plus précieuses que le reste du monde.
Valentian passa la main dans la crinière fauve de sa monture, rendue chaude par les rayons ardents.

- Qu'en dis-tu, Erzen ? Rien ne nous force à y aller... Après tout ils ne me sont plus rien.

Le jeune magicien sentait un noeud se former dans sa gorge et son estomac à la seule idée de retourner dans le château de son enfance. Tous se presseraient autour de lui ; retrouver chacun d'eux lui apparaissait comme une tâche éminemment fastidieuse lorsque la liberté absolue, elle, vous tendait les bras. Quel besoin d'aller s'emprisonner de son plein gré ?
Valentian retint toutefois le mouvement initié par son griffon qu'il lui avait lui-même intimé. Parcouru d'un frisson d'excitation, il tendit l'oreille. Ils n'étaient pas seuls ; ses sens acérés de magicien suivaient sans la moindre encombre la progression souple de l'intruse, sa course vive, son immobilisation. Un fin sourire aux lèvres, Valentian commanda à sa monture de reprendre sa marche. Cette situation était pour lui comme un vague écho des chasses auxquelles il avait pris part. Il avait toujours adoré la traque. Les proies croyaient vous ferrer alors même qu'elles étaient devenues victimes. En une fraction de seconde, de la satisfaction supérieure leur regard passait à la terreur.
Le magicien suivit des yeux le saut souple et gracieux de la jeune fille depuis une branche relativement élevée d'un arbre à quelques mètres sur son arrière gauche. Le supposé angle mort. Pour une enfant, elle n'était pas mauvaise.

- On ne passe pas !

Le sourire de Valentian s'élargit. Erzengel, surpris, avait fait volte-face et observait l'intruse avec curiosité.

- Bonjour, Laelys.

Elle était belle, c'était une évidence frappante. Magnifique. Les traits fins de son visage lui donnaient une allure sauvage de louve en chasse que soulignaient ses yeux verts. Vifs et clairs, en amande, leur regard acéré. La posture de son jeune corps élancé, les ombres qui se succédaient à une vitesse folle sur ses expressions clamaient qu'elle était à l'affut du moindre mouvement, du moindre bruit autour d'eux ; son air attentif, que cette disposition était pour elle parfaitement naturelle et involontaire.
La jeune fille portait des vêtements de voyage aux teintes marron-vert ; pantalon sombre, tunique resserrée à la taille, dague à la ceinture, bottes de cuir usé par les courses en forêt. Ses cheveux avaient beau avoir été ramenés en arrière, de fines boucles blond cendré se rebellaient -ce qui ne dénotait guère au vu du caractère de l'enfant - pour encadrer son visage. Elle portait un arc long de noisetier doré.

- Tu as changé, Val...

- Toi aussi.

La voix de Laelys éveillait en Valentian des échos enfouis depuis des années. Elle était franche, pleine et directe ; elle n'avait presque plus rien d'enfant. Pour autant, il entendit à nouveau les éclats de rire qui avaient hanté ses nuits à Maylaura. Laelys et ses courses folles, ses jeux, ses plans ingénieux... elle n'avait jamais su rester immobile un instant. Déjà, sept ans auparavant, les gens parlaient d'Elandra comme de la petite princesse de la famille, la belle jeune fille calme et douce, raffinée. Valentian lui avait toujours préféré Laelys et les années ne lui avaient pas donné tort ; il se demandait qui résistait à la beauté sauvage de sa jeune sœur. Beaucoup, se prit-il à espérer.

- Que faisais-tu ? reprit le garçon d'un ton dégagé.

- Je chassais.

Laelys eut un regard distrait à la ronde. En effet, elle avait tout du prédateur arrêté dans sa course. Pour autant, malgré l'attitude détachée des deux jeunes gens qui agissaient comme s'ils se croisaient de manière tout à fait anodine, ses yeux brillaient de bonheur.

- Puis-je te demander quoi ?

- Le magicien. Je suis plutôt douée d'ailleurs. Vois, j'ai ferré celui qu'on prétend être le meilleur du royaume.

- Tu es bien téméraire, fit Valentian avec un rire léger. On ne t'a pas dit que c'était une chasse dangereuse?

- Je n'ai peur de rien et je ne recule devant rien.

Une déclaration. Un éclair de fierté, de fougue et de défi passa dans les yeux de Laelys. Valentian appréciait de retrouver sa soeur cadette avec un tel caractère qui forçait son affection et son admiration, mais il ne put s'empêcher de craindre pour elle.
Laelys avança d'un pas, un doux sourire curieux sur les lèvres, son expression de chasseuse s'estompant peu à peu.

- C'est un vrai griffon ?

Ses yeux témoignaient de son émerveillement alors qu'elle tendait une main hésitante vers le museau de l'animal.

- Cela même, en plumes et en poils. C'est Erzengel, répondit Valentian avec une pointe de fierté.

Laelys avait terminé de couvrir la distance qui les séparait. Le griffon tendit la tête vers elle en quête de caresses qu'elle s'empressa de lui donner. Les animaux mythiques avaient décidément un côté navrant.

- Déjà jeune tu n'avais aucun goût pour les noms, commenta Laelys, toute à ses câlins.

Valentian se mordit la lèvre afin de résister à l'envie de lancer le "c'est ma fiancée qui l'a nommé" qui  lui brûlait la langue. Après tout, cette bravade perdait toute sa saveur en l'absence de leur père.

- Allons, monte petite soeur, allons au château.

Elle eut un sourire franc en saisissant la main de Valentian qui la hissa devant lui sur le dos d'Erzengel. Sur ordre de son maître, le griffon prit une impulsion souple et décolla au-dessus de la vallée que surplombait la demeure familiale. Val glissa un bras autour de la taille de sa jeune soeur qui posa la main sur la sienne sans cesser d'admirer le paysage en contrebas. Des larmes brillaient sur les joues de Laelys... la vitesse, l'altitude. Tandis qu'il se penchait sur sa soeur, Valentian crut entendre un murmure... " Bienvenue à la maison ". Il n'aurait pu en jurer. Il existait des situations et des sentiments pour lesquels la magie ne vous était d'aucune utilité. Parfois, c'était elle qui vous leurrait... elle, et ses stupides voix prophétiques.


Last edited by Valentian El'Andard on Thu 12 May à 8:30; edited 4 times in total
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PostSubject: Re: Périples et péripéties de deux compagnons   Périples et péripéties de deux compagnons EmptyTue 30 Sep à 11:21

L'entretien de Valentian avec son père avait été de pure convenance et d'une formalité qui avait eu tôt fait de rassurer le jeune magicien. Un avait bien vu briller dans les yeux d'Endariël El'Andard des étincelles qui avaient serré son propre cœur, mais il les imaginait plus liées à des souvenirs de l'enfant qu'il avait été qu'à l'émotion d'un père retrouvant un fils. Il avait conscience de n'être plus qu'un étranger aux yeux des siens, tout comme eux l'étaient pour lui. Un envoyé royal, un envoyé de marque, à peine plus. Cela convenait parfaitement à Valentian - qui s'appliquait à ignorer superbement la note amère qui lui serrait la gorge, de quoi aurait-il pu être déçu ? - dans la mesure où il avait passé une partie de son voyage de retour à se demander comment réagir face à sa famille. Le détachement formel d'un presque étranger, du pupille du roi, paraissait l'une des solutions les plus simples.
Il semblait qu'Erzengel et lui se fussent trouvés quelque peu en avance par rapport aux prévisions de la maisonnée qui ne les attendaient que pour la soirée. La comtesse Delphia se trouvait encore en ville, pour l'heure, et le reste de la fratrie n'était pas au courant de l'arrivée de Valentian. Laelys avait quitté son aîné avant qu'il s'en fut trouver leur père, vraisemblablement peu désireuse de croiser le chemin du comte.
Les pensées du garçon ne parvenaient à le distraire suffisamment ; un sentiment de malaise, l'écho d'une nostalgie profonde grandissaient en lui à mesure qu'il remontait instinctivement les couloirs qui se redessinaient dans son esprit comme s'il ne les avait jamais quittés. Bien sûr, ses aptitudes de magicien lui permettaient de sonder le terrain et de se repérer aisément dans n'importe quelle demeure qui lui était inconnue, pourvue qu'elle fut exempte de sorcellerie. Mais ici tout était bien différent. Son instinct naturel le guidait, ses souvenirs d'enfant.
Ayant résolu d'aller saluer ses frères -de les surprendre alors qu'ils ne l'attendaient pas et d'observer leurs réactions, à la vérité- Valentian se demandait combien ils auraient changé. Il dressait au fil de ses pas leurs portraits possibles dans son esprit.
L'après-midi pourrait toutefois être entièrement dédié aux retrouvailles, ainsi le jeune magicien décida-t-il de privilégier celles avec le beau château de ses jeunes années. En particulier la pièce qu'il avait toujours le plus affectionnée. L'escalier de chêne crissait toujours sous les pas, aux endroits précis qui lui revenaient en mémoire à mesure qu'il progressait. Un frisson d'excitation, d'émotion pure le submergea lorsque lui parvint l'atmosphère feutrée qui se faisait droit en haut des marches... cette odeur si particulière, si caractéristique, les rayons du soleil qui toujours filtraient par la haute fenêtre pour baigner les escaliers et caresser son visage, la poussière que l'on voyait voler sous la lumière. La maison. Oui, c'était cela plus que tout, la maison.
La bibliothèque, toutefois -et ô combien malheureusement, retrouvailles gâchées !- n'était pas vide. Valentian grimpa les dernières marches dans un silence absolu et se campa derrière la porte entrouverte afin d'observer la scène qui se jouait entre deux de ses frères.

- Où est passée Laelys? Père va être fou de rage si elle n'est pas à l'heure au dîner.

- Devrais-je la surveiller nuit et jour sous prétexte qu'elle est ma jumelle ?

Arystide avait bien grandi... le vicomte chassait nerveusement de son visage ses mèches d'or bouclées en arpentant le centre de la pièce, décrivant des cercles plus ou moins concentriques autour de la chaise où se trouvait nonchalamment installé son jeune frère.
Romerick avait à peine daigné lever les yeux du volume de cuir qu'il tenait en main. Lové au soleil, les genoux appuyés contre la table de travail recouverte de velours pourpre, il avait parlé d'un ton monocorde avant de se replonger dans sa lecture.

- Ce serait bien, en effet, maugréa Arystide en choisissant machinalement un ouvrage sur les étagères qui lui faisaient face pour calmer sa tension -Valentian aurait parié que son aîné aurait était bien incapable de rapporter le titre du livre qu'il tenait. Il semblait agir de manière tout à fait mécanique.

- Il faudrait que ce soit très bien payé, souffla Romeryck comme en réponse à son aîné, c'est un travail ardu et quasi incessant.

Valentian sourit et poussa la porte afin de s'avancer à la rencontre de ses frères. Arystide s'était retourné et figé en une fraction de seconde ; Romeryck avait seulement relevé les yeux et l'observait en souriant.

- Encore le nez dans un ouvrage petit frère ? Il y a des choses qui ne changent pas, commenta Valentian en répondant au sourire de son cadet.

Arystide s'était promptement repris ; il vint s'incliner devant Valentian en une parfaite révérence de cour où perçaient la noblesse et l'assurance des hommes d'honneur.

- Excellence... Veuillez nous pardonner, nous ne vous attendions pas si tôt. Soyez le bienvenu chez vous.

Ses yeux verts qu'il tenait de leur famille comme le ton de sa voix soulignaient encore la première impression qu'Arystide avait faite au jeune magicien ; il était selon toute apparence un homme droit, fidèle, du genre à mourir pour son roi ou ses idéaux.

- Bonjour, vicomte Arystide. Je vous remercie de cet accueil, mon frère, répondit Valentian sur le même ton formel mais chaleureux.

Romeryck avait refermé son livre d'un geste sec tout en se redressant.

- Ça te va bien, de me dire ça... - référence subtile et complètement informelle aux heures passées par Valentian à de telles occupations au cours de sa jeunesse.

- Je parie que ça n'est pas un traité de magie, repartit Valentian avec un sourire en faisant mine de se pencher. Roman de chevalerie ?

- Quand même volé dans ta chambre, c'est seulement l'étagère d'en face.

- J'avais 7 ans, Romeryck.

- Ah, ça va, j'ai encore le temps, fit le cadet d'un ton théâtralement rassuré. J'suis large ! [Ah tu vois c'était là ! =D]

- Fais-moi le plaisir de parler comme il faut, Romeryck... Tu aurais pu tenir 5 minutes tu ne crois pas ? intervint Arystide d'un air blasé.

- Très bien, vicomte, fit Romeryck avec un sourire, insistant sur l'appellation.

- Ca, par exemple, c'était de trop...

Le benjamin de la fratrie haussa les épaules, posa le livre sur la table et eut un rire franc. Il sauta directement de sa chaise aux bras de Valentian qu'il serra contre lui, comme s'il s'était jusqu'alors retenu à grand peine.

- Val... Tu m'as manqué.

Le jeune magicien, décontenancé, répondit maladroitement à l'étreinte de son frère qui ne parut pas s'en formaliser.
Les trois garçons passèrent les quelques heures suivantes à deviser ensemble dans la bibliothèque. Si l'ambiance formelle adoptée d'emblée par Arystide et Valentian sembla inquiéter quelque peu Romeryck, il eut tôt fait de les en délester. A l'aise, il riait et plaisantait sans cesse, sincèrement heureux de retrouver ses frères. "Comme avant"... n'y avait-il que les jumeaux pour croire que rien n'avait changé, pour espérer si naturellement renouer avec le passé comme s'il n'y avait jamais eu de déchirure ? Le fossé entre Arystide et lui-même semblait à Valentian clairement palpable. Malgré son respect et son ouverture, le vicomte maintenait, à l'image du magicien, une barrière entre eux. Ils avaient été frères mais, pour l'heure, ils étaient des étrangers. Ils avaient eu beau se connaître enfants, ils étaient devenus adultes depuis lors, loin l'un de l'autre ; ils ignoraient tout du cœur du second si Romeryck, lui, leur offrait le sien en toute confiance.
L'heure du dîner approchant à grand pas et avec lui le retour officiel de Valentian, Arystide dut prendre congé de ses frères afin d'aller régler quelques détails avec leur père. Le jeune magicien résolut de l'accompagner.

- Laelys ne t'avait vraiment pas dit où elle comptait se rendre, Romeryck ? recommença Arystide avec une pointe d'agacement -Valentian n'avait pas jugé productif de rapporter à ses frères ses retrouvailles avec leur louve de soeur. Cela fait deux nuits qu'elle n'a pas dormi au château !

- Si on te demande, t'auras qu'à répondre que t'en sais rien...

- Essaie d'être respectueux de temps en temps, ça ne te tuera pas !

- C'est ça on lui dira... souffla Romeryck alors que ses aînés atteignaient la porte de la bibliothèque tandis que lui-même allait récupérer son roman.

- Rom !

L'intéressé sursauta au cri du vicomte et se fit discret ; Valentian souriait intérieurement en descendant les marches au côté d'Arystide, se demandant si son frère avait réellement entendu le murmure de Romeryck ou s'il le connaissait suffisamment pour avoir parié sur la réplique.
Le soleil avait commencé de décliner, la lumière des torches avait pris le relais. Comme avant, lorsqu'il regagnait tard sa chambre, les bras chargés d'ouvrages rongés par le temps... Oui, "comme avant"...


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La lumière ne déclinait pas encore, bien que les jours eussent tendance à raccourcir en cette période de l'année ; les chaudes teintes jaunes qui baignaient les couloirs semblaient vouloir l'encourager à avancer vers de plus belles pensées. Pour autant, le cœur d'Elandra El'Andard demeurait serré. De sombres présages lui nouaient la gorge. Ce soir devait rentrer Valentian, leur frère cadet. Sa proximité avec le roi ainsi que la sagesse qu'il avait très probablement acquise à l'Ecole palatiale seraient sans doute en mesure de les aider. Du moins plaçait-elle dans le jeune magicien ses espoirs secrets.
Par habitude, Elandra frappa légèrement avant d'ouvrir la porte en douceur. Elle se demanda à peine s'il l'avait entendue. Elle se mordit la lèvre alors qu'une fois encore son coeur se serrait.
Il se trouvait à l'endroit exact où elle se l'était figuré, penché sur un parchemin blanc d'allure officielle sur lequel courait vivement sa plume. Sans même qu'elle vît son visage, elle devinait aisément l'exaltation et la concentration se relayer sur les traits du jeune homme. Sa posture le trahissait assez, comme les envolées de la plume beige qui traçaient ses lettres élancées.
La passion et la distinction ; les deux termes qui le définissaient le plus justement.
Elandra s’approcha dans un silence relatif, troublé seulement par le bruit sourd de froissement de tissu de sa robe émeraude, de la chaise du jeune homme. Elle vint se camper derrière lui en douceur, si près qu’elle pouvait sentir le parfum qui émanait de lui ; une odeur de linge propre mêlée à la senteur fruitée et sauvage des fleurs d’été qu’elle avait toujours affectionnée. Qui le lui rappelait immanquablement. Il avait légèrement froncé les sourcils mais n’avait cessé d’écrire. Tacite preuve de confiance. Elandra se pencha légèrement sur l’épaule du jeune homme afin de parcourir la missive.
Il était poignant de découvrir ces mots sous son écriture. Beau et terrifiant à la fois.
 

- Tu ne saisis pas la portée de ce que tu es en train de faire, Augustyn, fit-elle finalement d'une voix basse mais vibrante d’émotion –plutôt due à l’inquiétude qu’à la colère.
 

- Disons plutôt, Elandra, que toi et moi ne l'appréhendons pas de la même manière…
 

Il s’était redressé, avait relevé les yeux. Le ton de sa voix était calme et posé, comme toujours, quoique légèrement irrité par le fait qu’elle l’eût interrompu dans son écriture.
 

- Je ne peux pas te laisser faire ça ! Ils n'auraient pas dû t'envoyer en mission dans le Nord ! Pas toi !
 

Ses émotions prenaient encore le pas sans qu’elle pût rien y changer, contrastant avec le calme souverain du jeune homme.
 

- Ça n'aurait rien changé, tu le sais bien.
 

- Cela t'a au moins encouragé.
 

- Je te demande seulement de m'ignorer Elandra... Je sais que cette histoire t'inquiète.
 

- C'est pour toi que je m'inquiète imbécile ! fit-elle avant de se mordre la lèvre afin de refouler ses larmes ; sa main serrait si fort le dossier de la chaise d’Augustyn que c’en était douloureux. Si jamais Père l’append…
 

- Père me soutiendra, répliqua-t-il avec douceur mais une certaine fermeté.
 

- Père t'estime beaucoup, il fonde de nombreux espoirs sur toi... Mais ça ne peut suffire à te garder de tout. Tu mets toute ta famille en porte-à-faux, sans même nous demander notre avis ! Tu devrais au moins en parler à Valentian, tu sais qu’il doit arriver ce soir.
 

- Tu as trop d'estime pour notre frère, et trop d'attentes à son sujet. Il nous ignore depuis des années Elandra. Je n'ai aucune confiance en Valentian.
 

- Comment peux-tu...? commença-t-elle en reculant d’un demi pas.
 

- Détrompe-toi, j'aime mon petit frère. Je chéris son souvenir et il me manque. Mais il faut que tu réalises qu'il n'est plus le poupon que tu dorlotais autrefois. J'attendrai de voir quel genre d'homme il est devenu.
 

Elandra soupira. Les yeux d’Augustyn étaient perdus dans le vague, vers quelqu’idéal qu’il entrevoyait avec certitude, sans aucun doute. Ne pas être influençable était souvent une qualité mais, pour l’heure, elle le voyait seulement se perdre seul dans la quête d’un monde inaccessible. Elle vint à nouveau s’appuyer contre la chaise du jeune homme, entoura ses épaules de ses bras. Il demeura quelques instants immobile puis il ferma les yeux et s’abandonna contre elle. Elle caressa ses joues, glissa ses doigts dans ses mèches châtain.
 

- Toi tu es devenu quelqu'un de bien, murmura Elandra, mais le monde est dur avec les rêveurs, Augustyn.
 

Le jeune homme soupira sous les cajoleries de sa sœur mais ne se dégagea pas.
 

- C’est bien plus qu’un rêve, répondit-il d’un ton las.
 

Elandra ramena ses mains sur les épaules d’Augustyn. Elle se pencha sur lui et l’embrassa sur la joue. Le jeune homme eut un sourire en croisant le regard de sa sœur.
 

- Tu devrais t'habiller pour dîner, souffla-t-elle avant de reculer, Père va nous faire appeler d'un instant à l'autre. Il faut que je retrouve Laelys.
 

- Vaste programme, en effet, fit Augustyn avec un rire léger, tous les nuages qui embrumaient son regard envolés. Tu es magnifique, Elandra, ajouta-t-il en retenant un instant la main de sa sœur en guise d’au-revoir.
 

Elle s’éloigna sur un regard complice. Arrivée à la porte elle ne put s’empêcher de se retourner ; Augustyn avait repris sa plume et continuait d’écrire comme si elle ne l’avait jamais interrompu.
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